Updated: May 18

La deuxième partie de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique (CDB COP15) se tiendra du 25 avril au 8 mai à Kunming, en Chine. En raison de COVID-19, cette importante conférence a été scindée en deux parties. La première a eu lieu en octobre 2021 dans un format virtuel.
L’objectif de cette conférence est l’adoption du Cadre mondial pour la biodiversité post-2020 (GBF post-2020), qui devrait fournir une vue d’ensemble stratégique et une feuille de route mondiale pour la protection, la restauration et la gestion durable de la biodiversité d’ici 2030.
La première partie de la COP15 a abouti à la déclaration de Kunming, dans laquelle les signataires ont affirmé leur objectif de “mettre la biodiversité sur la voie de la reconstitution d’ici à 2030 au plus tard”. Toutefois, cette déclaration n’est qu’un engagement théorique permettant aux pays de fixer leurs ambitions. Les véritables objectifs, les moyens de mise en œuvre, les obligations légales et toutes les autres spécificités, c’est-à-dire le contenu réel du GBF post-2020, seront négociés lors de la deuxième partie de la COP15.

Le cadre mondial pour la biodiversité et la théorie du changement
Le GBF post-2020 vise à établir un plan d’action pour les 10 prochaines années, définissant les objectifs et les rôles des gouvernements, des entreprises et des particuliers dans la protection de la biodiversité. Il est basé sur la théorie du changement, une méthodologie de planification, de mise en œuvre et d’évaluation du changement social, qui a été adaptée au contexte spécifique de la conservation et de la protection de la nature.
La théorie du changement vise à :
- mettre en œuvre des actions transformatrices pour réduire les menaces pesant sur la biodiversité
- veiller à ce que la nature soit utilisée de manière durable et équitable, et pour répondre aux besoins de la population
- suivre les progrès réalisés grâce à des mesures transparentes et quantitatives
- veiller à ce que toutes les parties prenantes soient impliquées, c’est-à-dire, en plus des gouvernements : les ONG, les populations autochtones et les communautés locales, les groupes de femmes, les jeunes, ainsi que les entreprises et les acteurs financiers.

Les objectifs du Cadre mondial pour la biodiversité
On s’attend déjà à ce que certains objectifs clés soient convenus dans le cadre du FBG post-2020, à réaliser d’ici 2030.

Protéger les écosystèmes
En 2019, seulement 15 % des zones terrestres et 7 % des zones maritimes étaient protégées au niveau mondial. L’objectif du GBF pour l’après-2020 est de protéger 30 % de la planète d’ici 2030 (l’objectif 30×30). Toutefois, cet objectif doit être discuté et négocié plus avant, car certaines questions clés restent sans réponse.
Par exemple :
Que signifie protéger “30 % de la planète” ?
- 30% de la surface totale de la planète ?
- 30% de la terre et 30% de la mer ?
- 30% du territoire de chaque pays ?
Qu’en est-il de la qualité écologique des zones protégées ?
- Comment gérer le risque que des pays protègent des zones d’importance écologique mineure uniquement pour atteindre l’objectif ?
- Comment évaluer la qualité écologique d’une zone ?
- Qu’en est-il des populations autochtones qui vivent dans ces régions ?
Ces questions doivent être abordées lors de la COP15 – Partie 2 à Kunming avant qu’un accord puisse être trouvé entre les nations.
Mettre en œuvre des actions
Les approches écosystémiques sont définies par la Convention sur la diversité biologique (CDB) comme des actions qui “utilisent la biodiversité et les services écosystémiques dans le cadre d’une stratégie globale d’adaptation pour aider les populations à s’adapter aux effets néfastes du changement climatique“. Ces mesures sont privilégiées par certains experts en biodiversité car elles permettent de lutter à la fois contre le changement climatique et l’érosion de la biodiversité grâce à des fonds destinés au climat (car ils sont actuellement plus importants que ceux destinés à la conservation de la biodiversité). Par exemple, les mangroves des zones côtières servent de puits de carbone qui contribuent à la lutte contre le changement climatique. Dans le même temps, la restauration des mangroves permet aux communautés locales de bénéficier des services écologiques qu’elles fournissent – protection contre les inondations et les tempêtes, nurseries pour les poissons, etc.
Toutefois, certaines ONG et certains gouvernements de pays en développement craignent que ces mesures basées sur les écosystèmes ne contribuent au “colonialisme du carbone“, c’est-à-dire que les pays développés utilisent ces mesures pour éviter leurs objectifs de réduction des émissions en stockant principalement le carbone sur les territoires autochtones des pays en développement et en expropriant les résidents locaux.
Le GBF post-2020 devra aborder cette question pour définir comment, par qui, où et quand les approches écosystémiques peuvent être mises en œuvre.
Augmenter les ressources financières pour la nature
La première version du GBF post-2020 prévoit que 700 milliards de dollars supplémentaires par an au niveau mondial seraient nécessaires pour la protection et la restauration de la biodiversité.
Les négociations devraient maintenant permettre de déterminer plus précisément la contribution financière de chaque nation. Pour l’instant, certaines nations se sont déjà engagées :
- La Chine va créer un fonds de 230 millions de dollars pour la biodiversité
- Le Japon ajoutera 17 millions de dollars à son fonds existant
- Le Royaume-Uni s’est engagé à verser 274 000 dollars supplémentaires au fonds fiduciaire volontaire de la CDB.
- La France s’est engagée à réorienter 30 % de son financement actuel en faveur du climat vers la biodiversité.
La question du financement de la protection de la biodiversité est, bien entendu, d’une importance cruciale. La deuxième partie de la COP15 suscite de grandes attentes et de grands espoirs, car cette question est, pour l’instant, pratiquement non résolue (les 700 milliards de dollars requis sont loin d’être atteints).
Les objectifs de l’UE
L’Union européenne s’est engagée à négocier des objectifs plus ambitieux lors de la réunion de Kunming. Tout d’abord, son interprétation de l’objectif 30×30 est que 30 % des terres et 30 % des mers seront protégés d’ici 2030. En outre, l’UE veut s’assurer que les 70 % restants seront utilisés de manière durable, au bénéfice des communautés locales. La question des ressources génétiques doit notamment être abordée. Depuis 1992, chaque pays est propriétaire des ressources génétiques présentes sur son territoire, ce qui signifie que :
- chaque pays peut décider de l’accès à ces ressources et de leur utilisation par d’autres nations
- les bénéfices de la recherche ou de l’innovation fondées sur ces ressources doivent être partagés avec le territoire d’où provient le matériel génétique
Toutefois, avec la numérisation et la mondialisation croissantes, cette réglementation est de plus en plus difficile à appliquer. Les informations génétiques sont désormais librement accessibles sur l’internet, et de nombreux pays (développés) affirment que ces données devraient effectivement être partagées. Cependant, les pays disposant d’un riche réservoir de matériel génétique mais ne disposant pas d’outils d’information ou de centres d’innovation exigent d’être inclus dans le partage des bénéfices auxquels leurs ressources conduisent (généralement des vaccins et des médicaments). Un groupe de travail a été créé, sous la direction de la Norvège et de l’Afrique du Sud, pour discuter de cette question et veiller à ce que ce mécanisme de partage équitable soit mis en œuvre au cours de la prochaine décennie.
Conclusion
La COP15 qui se tiendra à Kunming en avril est une réunion cruciale pour la biodiversité, dont dépend la conservation de la nature pour la prochaine décennie. Des objectifs ambitieux pourraient être adoptés, mais ils doivent être soutenus par un engagement fort des pays et un cadre d’action clair pour toutes les parties prenantes. De grands espoirs reposent sur le Cadre mondial pour la biodiversité post-2020, surtout si l’on considère que les objectifs précédents, les objectifs d’Aichi en matière de biodiversité fixés en 2010, n’ont pas été atteints…
Si vous cherchez des conseils pour évaluer et gérer l’impact de vos activités sur la biodiversité, contactez Cécile Klinguer ([email protected]), consultante en intelligence environnementale chez Greenfish.